Changer le monde avec des clics

La souris de l’ordinateur est-elle un instrument qui peut changer le monde ? Certes les réseaux sociaux, dans lesquels on interagit via la souris - et le clavier -, sont des puissants moyens de débat public via lesquels les idées s’échangent intensivement, intensément et en permanence. Que ces débats soient polarisés, que les algorithmes nous servent ce dont on est déjà convaincu et que le mode d’apparition des messages est addictif, là n’est pas la question. La position des réseaux sociaux dans la « sphère politique » est très précisément de faire caisse de résonnance aux nouvelles. Et en retour, les médias ex - « de masse » rendent compte de ce qui s’y dit, en résonnance de la résonnance et ainsi à l’infini comme les reflets dans deux miroirs qui se font face.  

Ce qui me désole c’est que j’imagine les socioréseautés et les socioréseauteurs qui sont intéressés par le débat public, donc par la politique, désespérés devant leur écran et en train de multiplier les likes et les partages en cliquant rageusement sur leur souris. Le monde n’en sera que plus torturé et dramatique, et ce ne sont pas ces clics qui vont l’apaiser, au contraire. Le contenu des partages est certainement de grande qualité, mais il est d’office contredit par d’autres qui peuvent aussi être considérés comme étant de qualité. Mais pas par les mêmes bien sûr … S’il s’était agi de paroles, on aurait dit que c’est « s’époumoner ». Ce qui est très mauvais pour la gorge et les poumons …

Quand on poste sur un réseau social, cela procure une grande satisfaction d’égo : on transmet quelque chose d’intelligent (que généralement on n’a pas écrit soi-même, c’est un partage) et en un clic, il est envoyé urbi et orbi et il reste sur la toile pour l’éternité. Comme c’est beau !

Alors que faire ? Il y a deux choses qui ne sont en fait pas si différentes : agir et profiter de la vie. Quand on agit, par exemple avec un acte de tolérance ou de bienveillance, ou en expliquant quelque chose sans vouloir à priori « gagner aux points » dans la discussion, on a une influence sur les quelques personnes qui nous ont vu, entendu ou subi, dans la mesure où elles ont été réceptives et pour les quelques instants où l’interaction a eu lieu, et un peu plus peut être si c’est mémorable. On a donc d’un côté une infinité de récepteurs de notre message et pour l’éternité, d’un autre côté quelques personnes tout au plus, et pour un temps plus ou moins court. Mais quel est le « message » qui aura le plus d’impact ? Celui qu’on voit défiler durant quelques secondes sur l’écran, noyé dans la masse des autres, contradictoires ou pas, ou la rencontre authentique et l’événement réel ?

L’autre chose qu’on peut faire c’est quitter son écran, ou le remettre dans sa poche si c’est un portable et profiter de la vie. C’est-à-dire, parler à ses semblables quel que soit leur costume, regarder ses ou les enfants jouer dans le bac à sable, lire un livre en papier, faire connaitre ses passions, aimer sans être possessif et encore bien d’autres choses. Tout ceci changera le monde bien plus que des clics.

Et si vous voulez faire de la politique, créez un parti et présentez vous aux élections. Si vous avez la majorité vous changerez le monde ! On peut rêver ? On DOIT rêver !

André Vital

Vendredi 16 mai 2025

Vous trouverez ici un texte sur le même sujet paru dans l’édition de 2018

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